Petite histoire de se tenir droit…
La vie s’est développée en apesanteur : dans l’eau, où les corps organiques composés de presque autant de molécules d’eau que leur masse égale en eau (90% pour la plupart des formes de vies animales) ne subissent que peu de pression. Les premiers squelettes n’avaient pas besoin de résister à la gravité.
Pour pouvoir se déplacer et bouger, ils étaient simplement composés d’une suite de segments osseux, réunis entre eux par des disques intervertébraux donnant de la souplesse à l’ensemble. En dédoublant les arêtes du poisson, la nature a développé la cage thoracique articulée, ouvrant ainsi la possibilité de la respiration aérienne.
La locomotion, pour conquérir la terre ferme, nécessita ensuite des membres articulés, convenablement fixés sur la colonne vertébrale par l’intermédiaire d’omoplates et d’un bassin. Hors de l’eau, ces membres et, dans une moindre mesure avant la station debout, la colonne vertébrale, subissaient la pression de la pesanteur. L’articulation étant constituée de deux parties d’os frottant l’une contre l’autre, il fallait éviter leur usure. Pour cela, la nature a recouvert ces deux têtes osseuses d’un autre type de cellules, le cartilage. L’ensemble baigne dans un liquide huileux, la synovie, secrétée à la surface interne d’une capsule articulaire qui assure l’étanchéité du tout. Le cartilage, ne pouvant être vascularisé à cause des pressions qu’il subit hors apesanteur, est nourri par imbibition : quand l’animal est en appui sur ses pattes, la synovie diffuse dans le cartilage sous le simple effet de la pression. Quand il se repose, le cartilage exsude cette humeur. Ainsi s’effectuent les échanges nourriciers du cartilage, sa respiration.
Les premiers animaux qui expérimentèrent la station débout le firent en équilibrant le haut du corps par une masse équivalente à l’arrière, une queue massive. Puis, en allongeant et en lestant les membres antérieurs, ceux-ci purent remplacer la queue dans son rôle de balancier et permirent la station debout prolongée.
Les articulations entre chaque vertèbre de la colonne procurent alors une liberté de mouvement fantastique. Tous les mouvements et leurs combinaisons sont possibles : la translation, la rotation et la flexion.
La colonne une fois redressée devait néanmoins pouvoir résister au poids du buste, ainsi qu’aux chocs. Ce sont ces mêmes disques intervertébraux qui remplirent le rôle d’amortisseurs. Les vertèbres disposées plus bas se firent plus massives, la dernière reposant sur le plateau sacré. Pour suppléer aux disques intervertébraux, un deuxième mécanisme d’amortissement des chocs se mit en place dans la colonne vertébrale, les courbures. La combinaison d’une légère cyphose et d’une lordose, en ajoutant de la souplesse à la colonne vertébrale, retarde l’usure des disques. Ces deux courbures, de signes opposés, se contrebalancent l’une l’autre. Mathématiquement, elles s’annuleraient presque et reviennent à la verticale.
Pour ne pas s’effondrer sur elle-même, la colonne est dotée d’un système de haubans musculaires, qui s’attachent sur les protubérances osseuses des vertèbres, les apophyses.
Toute la colonne vertébrale peut donc être considérée comme une suite d’articulations, constituées chacune de la jonction de deux os, les vertèbres, recouverts d’un cartilage, le listel, et baignée dans un liquide gras, la synovie. Entre les cartilages se trouve le disque intervertébral, sorte de capsule fibreuse solidaire des deux grands ligaments qui courent sur les faces antérieures et postérieures de la colonne. Cette capsule fibreuse enserre en plusieurs couches, comme les pelures d’un oignon, le nucleus pulposus, objet semi-fluide composé de 95% d’eau, similaire au cristallin de l’œil. En apesanteur ou couché, il prend une forme sphérique. C’est le noyau du disque. (A noter que ce nucléus peut s’échapper sous l’effet d’un mouvement violent, en déchirant les enveloppes fibreuses qui le retiennent. C’est la lombalgie ou lumbago). Chaque jonction de vertèbres ressemble ainsi à une suspension oléopneumatique.
Cette colonne en zigzag, qui repose sur un plateau sacré incliné, en moyenne de 30 à 45°, est d’une conception dynamique ; tout y est question d’équilibre entre les forces et les tensions des ligaments.
Au final, le corps humain est ainsi capable de fonctionner comme un ressort géant.
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On voit qu’anatomiquement ‘tenir la colonne vertébrale bien droite’ recouvre en fait une incroyable complexité. Cette ‘tenue droite’ de la colonne vertébrale verticalise l’homme et libère ses membres antérieurs. La colonne ne peut résister aux pressions, à l’usure et aux chocs que si elle est maintenue dans le respect de l’alignement de ses vertèbres et dans le respect de ses courbures naturelles.
A cette condition alors, le corps humain, via son squelette, est à même de renvoyer dans le sol des forces très grandes, bien supérieures à son propre poids : le corps vertébral peut encaisser une demi tonne, tandis que le nucleus peut résister à des pressions de 1400 kg.
Au sommet de la colonne, la tête tenue droite, mais non raide, permet à l’énergie,(Qi et Shen surtout) d’irriguer le cerveau.
Le cou est le deuxième maître. |Traité de la Compréhension de l’Esprit, attribué à Sung Shu Ming|
‘Tenir la colonne droite’, est une action physiologique, mais elle implique également différents processus et attitudes psychologiques et émotionnelles qui améliorent le fonctionnement des organes, mais surtout, disposent à la transformation de soi-même.